Homme en costume avec boîte en carton.

60 000 dirigeants ont perdu leur emploi en 2024 : pourquoi ce chiffre est si alarmant ?

La perte d’un emploi touche bien plus que les chiffres d’un bilan financier. Quand 60 000 dirigeants quittent leur poste en France en l’espace d’un an, ce n’est pas seulement un signal d’alarme économique, c’est un choc structurel. Cette donnée, issue de l’observatoire de l’emploi des entrepreneurs, illustre un phénomène profond qui dépasse les aléas conjoncturels. La perte d’emploi chez les chefs d’entreprise n’est ni abstraite ni isolée : elle reflète la fragilité croissante du tissu entrepreneurial français.

Un phénomène aux causes multiples

Derrière les chiffres se cachent des réalités souvent brutales. Les procédures collectives, les liquidations judiciaires et les cessations d’activités sont les principales causes du départ forcé des dirigeants. Le ralentissement économique affecte directement les petites et moyennes structures, souvent dirigées par un fondateur ou un gérant très impliqué dans l’opérationnel. Ces structures disposent rarement de marges de manœuvre suffisantes pour absorber les chocs successifs liés à l’inflation, aux hausses de charges et à la baisse du pouvoir d’achat des ménages.

À cela s’ajoute l’effet de rattrapage post-COVID. Certaines entreprises, jusqu’alors maintenues artificiellement en vie par les aides d’État, se retrouvent sans solution viable une fois les dispositifs achevés. La sortie du quoi qu’il en coûte agit comme un révélateur des vulnérabilités accumulées.

Les répercussions humaines de la perte d’emploi chez les dirigeants

Lorsqu’un salarié perd son emploi, il bénéficie en théorie d’aides financières, d’un suivi Pôle emploi et de dispositifs de reclassement. En revanche, un chef d’entreprise non salarié ou mandataire social ne bénéficie pas automatiquement d’une couverture chômage. Cette absence de filet de sécurité rend leur situation particulièrement délicate. La dimension psychologique est souvent sous-évaluée : il s’agit d’une perte de statut, de réseau et parfois d’une part de l’identité personnelle.

Le retour sur le marché du travail est d’autant plus complexe que les parcours entrepreneuriaux ne sont pas linéaires et peuvent être mal perçus dans le monde du salariat classique. La reconversion nécessite non seulement des ressources financières, mais aussi un accompagnement spécifique que peu de structures publiques proposent aujourd’hui.

Des secteurs particulièrement impactés

Deux hommes dans un restaurant vide, à louer.

Le commerce de détail, la restauration, le BTP et les services aux entreprises concentrent une part importante des défaillances observées. Ces secteurs, très représentés dans les TPE-PME, ont été exposés à des chocs successifs : inflation des prix de l’énergie, tensions sur les chaînes d’approvisionnement, baisse de la demande ou encore difficulté à recruter.

Les transformations structurelles telles que la digitalisation forcent aussi un repositionnement stratégique que toutes les entreprises ne peuvent mener à bien faute d’expertise ou de fonds propres suffisants. Dans un tel contexte, le risque de perte emploi chef d’entreprise s’intensifie, en particulier pour les profils les plus isolés ou sans réseau professionnel solide.

Quels leviers pour enrayer la tendance ?

Face à l’envergure du phénomène, certains acteurs institutionnels et associatifs appellent à renforcer les dispositifs existants comme l’assurance perte d’emploi pour les créateurs, les aides à la reconversion ou encore les cellules de soutien psychologique. Cependant, ces mesures restent éparses et peu connues du grand public.

Des propositions émergent pour créer un système plus équitable entre les entrepreneurs et les salariés, notamment en matière de couverture sociale. Cela impliquerait une refonte du statut de dirigeant et une reconnaissance de leur contribution essentielle à l’économie nationale, au même titre que tout autre actif.

En parallèle, un effort accru d’accompagnement préventif semble indispensable : diagnostic stratégique, coaching de leadership, formation continue, ou encore accès facilité à la médiation en cas de difficultés financières. Ces outils peuvent freiner la perte d’activité avant qu’elle ne se transforme en cessation pure et simple.